Poirier
Appellations désuètes- poirier commun, aigrin, blossonier, blessonnier.
Famille- rosaceæs
Origine- de l'Asie mineure au Cachemire.
Type de plante- arbre à feuillage caduque.
Multiplication et culture- semis ou greffage sur cognassier.
Intérêt pour la faune- abeilles, oiseaux.
Historique
Le poirier était connu des populations préhistoriques et à plus forte raison des Romains et des Grecs car il abondait dans le Péloponèse que l'on nommait Apia au dire d'Athénée. Auparavant et selon la légende, les premiers habitants d'Argolide, guidés par Inachos, se nourrissaient de poires sauvages.
L'albanais dardhë, poire, venant d'un mot illyrien, donna son nom à la province de Dardanie.
Arriva t-il en Italie par les Balkans? Toujours est-il que Caton l'Ancien en mentionne six variétés et 200 ans plus tard, Pline, trente-cinq. On en faisait un raisiné et du poiré que les médeçins interdisaient à leurs malades, sûrement à cause de l'astringence des poires qui, alors, étaient plus proches des poires sauvages que de nos poires modernes.
Sainte Hildegarde dit le fruit du poirier lourd, pesant et âpre et que le suc se durcit autour du foie et du poumon comme une concrétion de plomb ou de tartre. Par contre elle utilise le gui du poirier contre les douleurs de poitrine et associé à de l'huile d'olive, de la graisse de cerf et du nard en pommade appliquée sur les endroits du corps atteints d'arthrite paralysante. Des poires cuites associées à du galanga, du fenouil des Alpes, de la réglissse, de la grande passerage et du miel, elle en fait un électuaire plus précieux que l'or... qui détruit toutes les humeurs mauvaises qui sont en l'homme, et ainsi le purifie comme on nettoie un vase des impuretés qu'il renferme.
L'école de Salerne considérait que "sans vin, les poires sont un poison, cuites au vin, un antidote, crues un venin."
Par l'amélioration de ces fruits, tous ces adages perdirent peu à peu toute signification.
Ainsi la poire la plus ancienne connue dans l'histoire de l'arboriculture est la "Martin sec" présentée en 1292 comme une variété de table. Plus tard à la fin du XVIIe siècle, La Quintinie la recommandait; d'après les critères d'aujourd'hui, c'était sans doute une poire à cuire.
• La poire "Bon-chrétien" doit son nom à François de Paule que Louis XI fit appeler sur son lit de mort pour le guérir; celui-ci offrit au roi une semence de poirier originaire de sa Calabre natale pour qu'il la sème et l'entretienne avec grand soin. Ce poirier fut ainsi baptisé "Bon-Chrétien".
Ceci est une légende car Francesco Florio visitant la Touraine à l'automne 1467, était enthousiasmé par la qualité des poires Bonum christianum merveilleusement bonnes aussi bien crues que cuites et dignes d'être des fruits du paradis.
Il apparut ensuite, peu avant 1770, à Alderton et c'est M. Williams, un pépinièriste de Turnham Green qui le multiplia et le distribua sous le nom de poire "Williams Bon chrétien". Puis il gagna l'Amérique en 1799 par l'intermédiaire de M. Barlett habitant près de Boston et prit le nom de ce dernier. Il devint le poirier la plus cultivée au monde.
• Il est difficile de rapporter la véritable création de la "Besi de Chaumontelle" tant les précisions manquent et divergent. Toutefois on peut dire qu'elle fut crée dans ce village du Val-d'Oise vers 1750, par le jardinier du manoir du Pralet; c'est lors de l'hiver très rigoureux de 1789 que le pied mère mourut.
Le pomologue Merlet l’inscrira dans son édition de 1675 parmi les Bezi, c’est-à-dire poires de première qualité, en la baptisant "Poire de Chaumontel".
Les poiriers taillés en formes palissées étaient l'apanage des vergers bourgeois et des châteaux alors que le pommier restait l'arbre du paysan.
de l'usage de la poire et du poirier dans la vie quotidienne
médicinal
phytothérapie- feuilles des jeunes pousses en infusion; une cure de poires ferait perdre de la tension.
culinaire
Fruits frais ou séchés, compotes, résiné, tartes.
boissons
On en fait du poiré et du jus.
artisanal
Le bois de poirier servait aux ébénistes, aux marquetteurs, aux fabricants d'instruments à vent et de précision, d'outils de menuisiers.
Aujourd'hui, il sert encore aux sculpteurs et aux tourneurs.
horticole
Haies fruitières. Vergers de production intensive.
traditions
Dans une fête argienne, les enfants se traitaient amicalement de "lanceurs de poires".
En Suisse, dans le canton d'Argovie, on plantait un pommier à la naissance d'un garçon, un poirier à celle d'une fille. L'enfant grandissait ou périssait avec l'arbre.
Dans l'Orne, pour chasser les mauvais esprits qui attaquaient les poires et les pommes, on brûlait la mousse présente sur les troncs et les branches en chantant.
croyances
Dans les croyances archaïques, les fleurs de poirier étaient le reflet de la lune divinisée. Or cette dernière brillait sur le monde des morts; ceci donna au poirier le caractère souvent sinistre qu'il garda dans le folklore. Ainsi le bois du poirier qui craquait lorsqu'il entrait dans la composition d'un meuble, dénonçait la présence d'êtres invisibles dans la maison.
Humour: un paysan sicilien, voyant qu'avec le bois d'un poirier stérile, on allait façonner une croix, lança à son adresse: Tu n'as pas fait de poires et tu veux faire des miracles!
magie
Portée en amulette, la racine de poirier empêche le travail de la femme en couches.
Les poires doivent être éloignées au moment de l'enfantement.
De l'usage du poirier et de la poire dans la vie littéraire, intellectuelle et spirituelle.
Le poirier dans la petite histoire
• Lors de la guerre de Messénie, Aristomène poursuit les Lacédémoniens alors que son devin Théoclos lui conseille de s'arrêter car il y a tout près un poirier sur lequel jadis les Dioscures s'étaient assis. Malgré ce conseil, Aristomène dépasse le poirier sauvage, perd son bouclier permettant à ses ennemis de disparaître.
• Claudius Drusus, fils de l'empereur Claude et d'Urgulanilla mourut jeune, étouffé par une poire.
• Selon Girard de Rialle, l'évêque d'Auxerre Amateur fit arracher et brûler un poirier auquel les chasseurs apportaient la tête des bêtes tuées.
• Lors du sacre d'un roi en la cathédrale de Reims, celui-ci recevait en cadeau une poire et une coupe de champagne représentant les richesses de cette ville.
Le poirier chez les écrivains
Lexicographie
- poirier
- poire
Dans les contes
L'aspect sinistre du poirier fait que dans un conte suisse Le Chasseur bossu, personnage démoniaque, joue de mauvais tours sur un poirier sauvage, y pendit les siens et s'y pendit lui-même.
Le symbolisme du poirier et de la poire
Cesare Ripa- La poire est présente dans l'allégorie du mois de septembre.
Iconogaphie chrétienne- La poire, alors qu'elle porte dans l'imagerie populaire un caractère négatif, dans l'iconographie chrétienne, elle transmet une image positive. Ainsi, tenue par la Vierge ou à ses pieds elle fut très représentée par différents peintres tels Alessandro Bonvicino, Albrecht Dürer
, Cornelis van Haarlem
, Ambrosius Benson
et sur les statues
. Elle permet de penser que ce fruit pourrait faire allusion au psaume XXXIV-9, où il est dit: "Goûtez et voyez comme Yahvé est bon!".
Nous pouvons remarquer que déjà à cette époque, ce fruit n'a plus l'aspect d'un fruit sauvage âpre et astringeant, mais parait être sucré, doux et savoureux. Dans la main de la Vierge, il pourrait en signifier ses attributs, douceur et bonté, et pourquoi pas, image du salut où tout est douceur.
Dans les rêves- La poire est un symbole typiquement érotique... Ceci est probablement dû à sa saveur douce... mais aussi à sa forme qui évoque quelque chose de féminin.
Dans les rêves du cultivateur, le poirier cultivé lui est favorable mais le poirier sauvage lui est de mauvaise augure.
Le poirier dans les religions et mythologies
mythologie grecque- le poirier était consacrée à Héra, l'épouse de Zeus où sa statue dans l'Héraion de Mycènes était en bois de poirier venant de Tirynthe.
Peut-être partageait-elle cette propriété avec Athéna car il existait à Thèbes un temple dédié à Athena Onca.
Le poirier poussait dans le bois consacré à Déméter et ses fruits étaient appréciés de Pan et Priape.
Phylacos qui retient prisonnier Mélampous, lui propose, en échange de son troupeau et de sa liberté, de lui dire la raison pour laquelle Iphiclos n'a pas d'enfants. Le marché conclut, Phylacos apprend qu'Iphiclos enfant, avait vu son père alors qu'il châtrait ses béliers, venir à lui, un couteau ensanglanté à la main qui l'avait effrayé. Il avait ensuite planté son couteau dans le poirier sacré pour le mettre à l'abri et courut rassurer son fils. Phylacos oublia son couteau qu'il récupéra alors. Il recueilli la rouille issue du sang du bélier qu'il coupa avec de l'eau et en donna à boire à son fils durant dix jours. Ce dernier eut alors un fils nommé Podarcès; Mélampous reçut le troupeau de Phylacos en recouvrant sa liberté.
C'est près d'un poirier qu'Ulysse pleure en apercevant son vieux père. Voir
mythologie romaine- Il fait partie des arbres de mauvaise augure et est consacré aux divinités infernales; il est brûlé pour conjurer les présages funestes.
en toponymie
pirarius- poirier en latin- Priez, Périers-en-Auge, P.-sur-le-Dan, Péré, Périers-la-Campagne, P.-sur-Andelle, Périers, P.-en-Beauficel, peut-être Le Poiré-sur-Velluire et Le P.-sur-Vie.
pirus- poire en latin- Peri, Pero-Casevecchie Perelli, Préaux, peut-être Priaires et Le Poiroux.
De l'usage du poirier et de la poire dans les arts décoratifs.