'incunable Hypnerotomachia Poliphili écrit en latin, porte la date du 1er mai 1467.
L'édition vénitienne, parue en 1499, précise qu'elle fut écrite deux fois. Cette dernière, écrite en italien emplie d'apports grecs, latins, arabes et espagnols devient une oeuvre complexe et difficilement compréhensible pour le lecteur.
Aussi E. Kretzulesco-Quaranta propose que ce serait l'humaniste Leon Battista Alberti qui l'aurait écrite puis, pour éviter le bûcher, son successeur se serait adressé à Franscesco Colonna pour sauver l'oeuvre. Une nouvelle version difficilement décryptable aurait ainsi été crée avec l'aide d'érudits. Le préfacier nous en prévient.
Apostolo Zeno attribua cette oeuvre à un moine, Franscesco Colonna, attribution contestée plus tard puisque ce moine ne connut jamais les monuments de Rome et n'avait pas la connaissance nécessaire en archéologie pour avoir écrit "le Songe".
On s'intêressa donc à un autre Francesco Colonna, seigneur de Palestrina à qui aurait été confié l'ouvrage qui, transformé, a pu été édité sous le patronage de Francesco Colonna. Ceci n'empêchera pas Francesca Colonna d'être accusé d'hérésie et de voir tous ses biens saisis au profit de la papauté.
l conte un songe qui transporte Poliphile, amoureux de Polia, dans un monde merveilleux, jonché de débris antiques et peuplé d'êtres fabuleux, de nymphes, de déesses et de dieux.
Cet ouvrage se compose de deux parties, l'une racontant le rêve, la seconde les amours contrariés qui seraient ceux de Laurent de Médicis dit "le magnifique" et de Lucrezia Donati, une famille rivale du premier. L'ouvrage est orné de 172 gravures sur bois que des auteurs attribuent à Mantegna et à Giovanni Bellini. Shakespeare se servira de cette histoire pour écrire "Roméo et Juliette".
La première partie est une allégorie de la quête de la sagesse personnalisée par Polia que Poliphile, qui serait le cardinal Jean de Médicis, futur Léon X, cherche à conquérir.
Jacques Gohory y vit un itinéraire alchimique, contesté par certains auteurs, bien que tout parcours vers la sagesse se ressemble, puisant à la même source. Le rédacteur du songe le connaissait mais n'était pas obligatoirement un alchimiste!
Cet ouvrage marquera l'avénement du jardin de style Renaissance en Italie - et la fin du jardin médiéval - que les guerres d'Italie feront connaitre aux Français sous les règnes de Charles VIII, Louis XII et François 1er.
Vous ne pourriez croire les beaux jardins que j'ai en cette ville. Car ma foi, il semble qu'il n'y faille qu'Adam et Eve pour en faire un paradis terrestre, tant ils sont beaux et pleins de toutes bonnes et singulières choses comme j'espère vous en conter...
écrivait Charles VIII s'adressant par lettre, à son beau-frère Pierre de Bourbon, le 28 mars 1495.
ans un songe, après avoir échappé à plusieurs dangers, Poliphile arrive en un lieu enchanteur, siège du palais de la reine Éleuthérilide.
Je laisse à vous conter les beaux vergers, jardins, prés, saussaies, fontaines et ruisseaux, enclos et courant entre les rives de marbre blanc, bordés de fleurs toujours verdoyantes, nourries de doux vents en temps serein, sous un ciel tempéré, en contrée plaisante et saine, bruyante du chant des oiseaux, abondante en tous biens terrestres et les coteaux couverts d'arbres si proprement arrangés, qu'il semblait qu'on les eût plantés à la ligne et tout exprès mis en ce pont pour donner plaisir aux regardants.
Après un banquet suivi d'un bal, il est mené par Logistique et Thélèmie:
Adonc elle me mena... en un beau verger contenant en circuit autant comme tout le logis où la reine faisait sa résidence. A l'entour duquel, tout au long des murailles, il y avait des parquets de jardinages en forme de caisses, dedans lesquelles étaient plantés des buis et des cyprès entremêlés, à savoir entre deux buis un cyprès,
Le jardin de verre. les troncs et les branches de fin or, mais le feuillage était de verre si proprement contrfait que l'on eût pris pour naturel. Les buis montaient en toupeaux ronds d'un pas de haut, et les cyprès en ponte doublant cette mesure. Il y avait des herbes et des fleurs pareillement feintes de verre, de diverses couleurs, formes, et espèces, du tout ressemblantes aux naturelles. Les planches des parquets étaient, pour clôture, environnées de lames de verre, dorées et peintes par le dedans de plusieurs belles histoires. Les bords avaient deux pouces de largeur, garnis de moulures d'or, tant par haut que par bas, et les coins couverts d'un petit feuillage d'or en forme de biseaux. Le jardin était clos de colonnes ventrues faites de verre en forme de jaspe, embrassées de l'herbe dit liset ou voluble avec ses fleurs blanches pareilles à des clochettes, toutes de bosse du même verre coloré [d']après le naturel.
[...] Le plan et parterre du jardin était fait à compartiments composés d'entrelacs et autres figures de belle grâce, diapré d'herbes et fleurs de verre ayant lustre de pierrerie: car il n'y avait rien de naturel, et néanmoins cela rendait une odeur soeve, propre et convenable à la nature de l'herbe qui en était représentée, à cause de quelque composition dont elles étaient frottées. Je regardais longuement cette nouvelle manière de jardin, et la trouvai fort étrange en moi-même.
Après cette visite, Logistique et Thélèmie mènent Poliphile au labyrinthe d'eau puis à un second jardin.
Ce jardin était de l'autre côté du palais, fait de la même grandeur et façon que celui de verre, et semblable en la disposition des planches, fors que les fleurs, arbres, et herbes de celui-ci étaient de soie, les couleurs appropriées selon le naturel. Les buis et les cyprès arrangés comme les précédents, ayant les troncs et branches d'or, et au-dessous plusieurs herbes simples de toutes espèces, si vivement exprimées,
Le jardin de soie. que nature les eût avouées pour siennes; car l'ouvrier leur avait artificiellement donné leurs odeurs, avec je ne sais quelles compositions convenables, tout ainsi qu'à celles de verre. La muraille de ce jardin était faite par industrie singulière, avec une dépense incroyable. C'était toutes perles assemblées, de grosseur et valeur égales, par dessus lesquelles on avait étendu une tige de lierre, dont les feuilles étaient de soie, les branches et les petits filets rampants de fin or, et les corymbes ou raisins de son fruit, de pierres précieuses: [...] Le parterre était couvert de velours vert ressemblant à un beau pré sur le commencement du mois d'avril.
Au milieu de la place y avait un berceau, ou tourelle ronde, en forme de treille, dont les perches et les osiers étaient bien étoffés d'or par dessus, et tout à l'entour étaient ployées des branches de rosiers fleuris, couvertes de feuilles verdoyantes, mêlées de rose blanches et vermeilles, le tout en soie, tant approchantes du naturel, qu'on eût jugé les contrefaites plus belles que ne sont les vraies. Sous cette treille avait des sièges continués selon le rond, faits d'un fin jaspe vermeil. Le bas pavé d'une seule pièce ronde de jaspe jaune, mêlé de plusieurs couleurs confuses, mais rapportant toutes à une, tant claire et polie, que l'on y voyait tout le jardin comme dedans un grand miroir.
Puis Logistique entraina Poliphile...
en un autre jardin près de là, fermé de voûtes soutenues sur des piliers. Ces voûtes avaient cinq pas de hauteur depuis le plan jusques à la clef, et trois de large depuis un pilier jusques à l'autre: le tout fait de briques couvertes de lierre naturel, tant épais que l'on n'eût su voir un seul carreau de cette brique, et y avait cent voûtes en rondeur, faisant clôture du pourpris, à chacune voûte un autel de porphyre, et sur chacun autel, une nymphe d'or, différentes en habit et en maintien, toutes la face tournée devers le milieu du jardin, où était fondé un piédestal carré de pierre calcédoine, sur lequel était assis un plinthe rond de jaspe vermeil, contenant en sa hauteur deux pieds, et en largeur un bon pas et demi.
Le jardin des nymphes
Ce plinthe soutenait un triangle de même largeur, fait d'une pierre très noire: les coins ou crêtes de laquelle ne sortaient hors de la circonférence du plinthe rond. A chacune des trois faces était rapportée une image de représentation divine, ayant les pieds posés sur le plinthe rond. Au vide entre deux coins du triangle qui avait un pas de hauteur, les images étendaient leurs bras devers les coins un peu obtus, et tenaient trois cornes d'abondance, à l'endroit des trois angles directement contre le milieu. Ces cornes avaient deux pieds et quatre pouces de longueur, et étaient liées de rubans volants sur le fond et vide de la pierre noire. Icelles images figurées en forme de nymphes de fin or, et pareillement les cornes d'abondance et leurs ligatures. En chacune face du carré mis au-dessous, étaient gravées des lettres grecques, c'est à savoir en la première face trois lettres, en la seconde une, en la tierce deux, et en la quatrième trois. lesquelles assemblées faisient ce mot, ΔΥΣΑΛΩΤΟΣ.
Ce lieu est si beau, tant plaisant et délectable, que l'éloquence même se trouverait trop pauvre de termes, figures et couleurs de rhétorique, si elle se voulait amuser à le décrire, et serait une similitude mal à propos, où n'y aurait rien de convenable que de le comparer aux lieux par moi vus auparavant: car c'était la vraie retraite de soulas et délices bienheureuses, faites en jardins, vergers et petits bocages, ordonnés pour le but et dernière main de tout plaisir.
Ce lieu qui vient d'être évoqué n'est pas un jardin mais l'île dans laquelle il est planté. Ce nom a été choisi car Cythère comporte un temple dédié Aphrodite, mais selon E. Kretzulesco-Quaranta, il s'agirait de l'île d'Ischia aux eaux thermales qui possède une plage nommée Cétara où étaient jadis des jardins et un temple dédiés à Vénus, ainsi elle comporte tous les éléments favorables à un "paradis".
Il faudra une vingtaine de pages à l'auteur pour décrire l'ordonnancement et la beauté de ces jardins:
lire "Comment ils arrivèrent en l'île Cythérée…"
ans "Le Combat de Cupido et de la mort" François Habert nous décrit le temple de Bacchus dans lequel un jardinet où toutes fleurs estoient abondantes, l'odeur desquelles oultrepassoit toutes mondaines delices. Ung peu plus loing estoit la vigne de Bacchus que luy mesme de tous plátz de valeur & renom avoit exornée, scavoir est du plant delectable & savoureulx de Beaulne, Anjou, Láguedoc, de Riz, de Grave, D'orleans, de la conglutination desquelz procedoit une liqueur plus que ambrosienne, au vins phalernaulx digne destre preferée, la salle de Bacchus (ou apres le conuy on dansoit) estoit construicte de souefz aubepins, les ungs representans la blancheur lilialle, les autres une couleur azurée. La porte estoit faicte elegamment de romarin, de lavande franche, oeilletz, passencloux, soucye, & de blanches marguerites, qui consernoient perpetuelle vigueur, lodeur desquelles fleurs à ceulx qui en cette salle venoient, estoit si agreable, que de ce delectable lieu ilz ne se pouoient distraire.
mprisonné en 1559 pour ses convictions protestantes calvinistes à Saintes puis à Bordeaux, il est libéré en 1563 grâce à l'intervention du connétable Anne de Montmorency, catholique et mécène de nombreux artistes. La même année est signé la paix d'Amboise qui met fin à la première guerre de religions. Durant sa captivité il écrivit Recepte véritable pour laquelle tous les hommes de la France pourront apprendre à multiplier et augmenter leurs trésors dans lequel, parmi des sujets liés à l'agriculture, il imagine un jardin liant Nature et Ecriture, Création et Verbe divin, géométrie et utopie qui soit une cité de refuge, pour me retirer ès jours périlleux et mauvais; et ce, afin de fuir les iniquités et malices des hommes, pour servir Dieu en pure liberté...
Cet ouvrage paraitra à La Rochelle la même année que sa libération.
Protégé par Catherine de Médicis, il échappe en 1572 à la Saint-Barthélemy en se réfugiant à Sedan puis revient à Paris en 1574.
Arrêté à nouveau en mai 1588, il est condamné à être pendu et brulé, puis sur l'intervention du duc de Mayenne, ancien huguenot, sa peine est commuée en prison à vie; il meurt de faim, de froid et de mauvais traitements à la Bastille, un an à deux ans plus tard.
On ne sait où il fut enterré, et même s'il le fut!
On ne sait où, véritablement où il naquit; soit dans la région d'Agen, soit près de Saintes car lui-même dans ses écrits ne le précisa.
Voir à ce sujet l'ouvrage de Louis AUDIAT cité dans la bibliographie.
uvrages dans lesquels Bernard Palissy a pu trouver son inspiration:
•
Hypnerotomachia Poliphili de Franscesco Colonna;
• Sagesse et Ecclésiastique;
• Le psaume cent quatre;
• Architecture ou Art de bien bastir de Vitruve;
• Divers ouvrages d'architecture,
et dans les jardins italiens, qui après les guerres d'Italie sont à la mode en France.
Dans le jardin de B. Palissy on retrouve en effet, grottes, statues, parterres, poteries, jets et jeux d'eau dans les machineries, tous éléments propres à ces derniers jardins.
La nouveauté de cet ouvrage est l'introduction dans son jardin, du goût de la nature et l'idée de le marier à la nature environnante, le coteau, la prairie, la rivière. Ce qui pour cette époque, était un sentiment tout à fait étranger car il faudra attendre le XVIIIe siècle pour que ce dernier entre totalement dans les moeurs.
ès le début, il nous donne le lieu choisi, dans une vallée: Il est impossible d'avoir un lieu propre pour faire un jardin, qu'il n'y ait quelque fontaine ou ruisseau qui passe par le jardin; et pour cette cause, je veux élire un lieu planier au bas de quelque montagne ou haut terrier afin de prendre quelque source d'eau dudit terrier, pour la faire dilater à mon plaisir par toutes les parties de mon jardin...
Puis il fait appel à un mécène: Il y a en France plus de quatre mille maisons nobles où ladite commodité se pourrait trouver aisément, et singulièrement le long des fleuves...
ussitôt, la forme du jardin est placé sous le signe du grand Architecte, donc géométrique!
Au nord et à l'ouest, il est bordé de montagne, terriers ou rochers et au dessous de quelque source d'eau... venant de lieu haut..... Mais quoi qu'il soit, je veux édifier mon jardin en un lieu où il y ait une prée par dessous...; et ayant ainsi fermé la situation du jardin, je viendrai lors à le diviser en quatre parties égales, et pour la séparation desdites parties il y aura une grande allée qui croisera ledit jardin, et aux quatre bouts de ladite croisée, il y aura à chacun bout un cabinet, et au milieu du jardin et croisée, il y aura un amphithéâtre tel que je te dirai ci-après, aux quatre anglets du jardin. Il y aura en chacun un cabinet, qui sont en nombre de huit cabinets, et un amphithéâtre, qui sont édifiés au jardin. Mais tu dois entendre que tous les huit cabinets seront diversement étoffés, et de telle invention qu'on n'en a encore jamais vu ni ouï parler.
Voilà pourquoi je veux ériger mon jardin sur le psaume cent quatre, là où le prophète décrit les œuvres excellentes et merveilleuses de Dieu...
âti en briques cuites, il semble être un rocher de la montagne; il a, à l'intérieur, des sièges concaves creusés dans la muraille, séparés par une colonne sur piédestral et surmontée de chapiteaux, architrave, corniche et frise qui, autour du cabinet porte certaines lettres antiques, et aussi au long de ladite frise, y aura en écrit:
Ce cabinet s'ouvrira vers le sud et sera confondu avec le rocher, d'autant plus que son toit sera recouvert d'arbrisseaux portant fruits bons pour la nourriture des oiseaux, et aussi certaines herbes desquelles ils sont amateurs de la graine, afin d'accoutumer lesdits oiseaux à se venir reposer et dire leurs chansonnettes sur lesdits arbrisseaux, pour donner plaisir à ceux qui seront au-dedans dudit cabinet et jardin.
Et en maçonnant le dehors dudit cabinet, j'aménerai un canal d'eau, lequel je ferai passer audedans de la muraille, et étant ainsi maçonné dans le mur, je le dilaterai en plusieurs parties de pissures, qui sortiront par le dehors dudit cabinet...
Quand le cabinet sera ainsi maçonné, je le viendrai couvrir de plusieurs couleurs d'émaux depuis le sommet des voûtes jusques au pied et pavé d'icelui. [...] Et ainsi les émaux en se liquéfiant couleront, et en se coulant s'entremêleront, et en s'entremêlant ils feront des figures et idées fort plaisantes, et le feu ôté dudit cabinet, on trouvera que lesdits émaux auront couverts la jointure des briques ... de telle sorte que ledit cabinet semblera par le dedans être tout d'une pièce... et par tel moyen ... durera à jamais, et n'y faudra aucune tapisserie: car sa parure sera d'une telle beauté, comme si elle était de jaspe, ou porphyre, ou calcédoine bien poli.
Hugues SAMBIN- Œuvre de la diversité des termes dont on use
en architecture.e second cabinet se présente comme le premier, couvert d'arbrisseaux mais différe par la construction de plusieurs figures de termes qui serviront de colonnes, et seront posés... sur un certain embasement, qui servira de siège pour ceux qui seront assis dedans ledit cabinet. Au dessus comme dans le premier cabinet, architrave, corniche et frise reliant les différentes colonnes, il y aura écrit, en grandes lettres antiques:
Lesdits termes, qui feront gestes et grimaces étranges, seront émaillés de plusieurs et diverses couleurs...; aussi tout le résidu dudit cabinet...
Neuf ans après la parution de "Recette véritable", Hugues Sambin publiait "Œuvre de la diversité des termes" dont les deux termes rustiques avaient une forte expression mélancolique.
omme le premier, il sera couvert d'arbres et sortira du dehors du cabinet plusieurs pissures d'eau,... et le dedans... sera tout rustique comme si un rocher avait été creusé à grands coups de marteaux.Autour, des sièges creusés dans la muraille et autour une manière d'architrave, frise et corniche, non pas proprement insculptées ... à grands coups de marteaux; toutefois elles auront quelque apparence, et seront gravées certaines lettres antiques... qui dénoteront que Il sera couvert d'un émail blanc madré, moucheté et jaspé de diverses couleurs... et ses émaux seront luisants et plaisants, comme ceux du premier et second.
l est construit comme les trois autres mais semblera avoir été creusé dans un rocher. Ledit cabinet sera tortu, bossu, ayant plusieurs bosses et concavités biaises, ne tenant aucune apparence ni forme d'art d'insculpture, ni labeur de main d'homme; et seront les voûtes tortues de telle sorte qu'elles auront quelque apparence de vouloir tomber, à cause qu'il y aura plusieurs bosses pendantes.
Sur ce quatrième cabinet sera écrit:
d'un émail de couleur d'un calcédoine, jaspe madré et moucheté d'un émail blanc, qui en se fondant... fera plusieurs veines, figures et images étranges.... Et par le dehors sera maçonné de grosses pierres, telles comme elles seront prises au rocher... afin que le cabinet ressemble proprement un rocher naturel.
"Les quatre cabinets feront donc office d'échantillons dans un "catalogue" de grottes. Mais à condition d'être visités dans l'ordre, ils constituent aussi une véritable illustration des origines "naturelles"de l'architecture. [...] Le visiteur du jardin de Palissy s'enfoncera de plus en plus dans le "rustique", depuis la pleine maturité de l'architecture, avec ses niches et ses colonnes classiques, jusqu'à la caverne naturelle, avec ses trous et ses bosses, en passant par une étape grossière, symbolisée par des figures bizarres et grinçantes et par les premières et comiques ébauches d'un langage architectural."
Anne-Marie Lecocq- Le jardin de la Sagesse de B. Palissy.
uant est de ces quatre cabinets-ci, ils seront faits de certains hommeaux, que je planterai tout à l'entour de la circonférence de la place que j'aurai portraite pour la grandeur de mes cabinets...
u premier des quatre cabinets qui seront ainsi faits d'hommeaux, y aura au dedans et dessous la couverture des branches... à chacun un rocher qui sera maçonné avec la muraille de la clôture du jardin. Ce premier rocher... sera fait de terre cuite, insculptée et émaillée en façon d'un rocher tortu, bossu, et de diverses couleurs étranges.
Au bas et pied du rocher, il y aura un fossé... qui tiendra autant en longueur que le rocher. Pour cette cause, je ferais plusieurs bosses en mon rocher sur lesquelles... je mettrais plusieurs grenouilles, tortues, chancres, écrevisses, et un grand nombre de coquillages de toutes espèces... Aussi y aura plusieurs branches de corail, duquel les racines seront au pied du rocher, afin que lesdits coraux aient apparence d'avoir crû dans ledit fossé. Item, un peu plus haut... y aura plusieurs trous et concavités, sur lesquelles y aura plusieurs serpents, aspics et vipères, qui seront couchés et entortillés sur lesdites bosses et au-dedans des trous. Et tout le résidu du haut du rocher sera ainsi biais, tortu, bossu, ayant un nombtre d'espèces d'herbes et de mousses insculptées, qui coutumièrement croissent ès rochers et lieux humides, comme scolopendre, capilli Veneris, adianthe, politricon et autres espèces d'herbes, et au-dessus ... il y aura un grand nombre de serpents, aspics, vipères, langrottes et lézards, qui ramperont le long du rocher... Et tous lesdits animaux seront insculptés et émaillés si près de la nature que les autres lézards naturels et serpents les viendront souvent admirer. [...] Et dudit rocher distillera un grand nombre de pissures d'eau, qui tomberont dedans le fossé... auquel fossé y aura un grand nombre de poissons naturels, et des grenouilles et tortues. Et parce que, sur le terrier joignant ledit fossé, il y aura plusieurs poissons et grenouilles insculptées de mon art de terre, ceux qui iront voir ledit cabinet cuideront que lesdits poissons, tortues et grenouilles soient naturelles, et qu'elles soient sorties dudit fossé, d'autant qu'audit fossé il y en aura de naturelles.
Aussi audit rocher sera formé quelque espèce de buffet, pour tenir les verres et les coupes de ceux qui banquetteront dans le cabinet. Et par un même moyen seront formés audit rocher certains parquets et petits réceptacles pour faire rafraîchir le vin pendant l'heure du repas [...] y aura une table de semblable étoffe que le rocher... ovale... émaillée, enrichie de diverses couleurs d'émail qui luiront comme un cristallin. [...]
Et quant est présent des hommeaux qui feront la clôture et couverture dudit cabinet, ils seront mis et dressés par un tel ordre que les jambes des hommeaux serviront de colonnes, et les branches feront un architrave, frise et corniche, et tympan, et frontispice, en observant l'ordre de la maçonnerie.
Ici, B. Palissy vante les mérites de colonnes faites de troncs d'arbre car ces derniers sont les œuvres du Souverain et premier édificateur
. Ce sont celles qui doivent être en honneur et non pas celles des édificateurs humains. [...] Et puisque le Souverain Géométrien et premier édificateur y a mis la main, il les faut plus estimer que celles des pierres, quelque rare qu'elles soient, hormis qu'elles fussent de pierre de jaspe ou d'autres pierres rares.
Il forme ces hommeaux tels des topiaires, qui formeront colonnes et clôtures des cabinets. Par des incisions au pied et à l'endroit du chapiteau de là adviendra qu'en ces parties blessées s'engendrera une superfluité de bois qui causera la forme du chapiteau et base de la colonne.
Par ploiement et travail des branches, celles-ci formeront architrave et frise dans laquelle il sera écrit en lettres antiques:
omme le premier, il est maçonné avec la clôture du jardin mais l'intérieur du cabinet le sera de certains cailloux blancs et diaphanes, lesquels j'ai amassé en plusieurs et divers champs, rochers et montagnes; et seront...arrangés et maçonnés ... d'un si bel ordre qu'il y aura plusieurs riches cavités et retraites qui serviront d'autant de sièges pour reposer ceux qui iront audit cabinet. Et d'icelui rocher sortira un nombre infini de pissures d'eau, qui feront mouvoir certains moulinets, et les moulinets feront jouer certains soufflets, et les soufflets jetteront leur vent dedans certains flajols qui seront dans un ruisseau... au pied du rocher... dont il s'ensuivra plusieurs voix de flajols gargouillantes... qui imiteront de bien près les chants de divers oiseaux, et singulièrement le chant du rossignol.
Et au tympan... il y aura écrit:
Ces machines hydrauliques étaient communs dans les jardins italiens de la Renaissance notamment à Pratolino. Ces inventions sont des perfectionnements des automates de Heron d'Alexandrie dont l'œuvre Les Pneumatiques était parue au XVIe siècle.
En 1624, Salomon de Caus fera paraitre son ouvrage "Les Raisons des Forces mouvantes" qui présentera des automates plus sophistiqués et des dessins de grottes destinées à enrichir les jardins de l'époque.
l sera comme les cabinets précédents mais creusé dans le rocher, les pissures d'eau seront encloses, fermées et maçonnées au dedans... afin qu'il semble que les eaux sortent naturellement de ce rocher. Mais pour le rendre plus admirable, je ferai enchâsser ... plusieurs coraux tels qu'ils viennent de leur nature, sans être polis, afin qu'il semble qu'ils aient crû audit rocher.
Aussi dans icelui rocher, je ferai enchâsser plusieurs pierres rares, que je ferai apporter de divers pays et contrées, comme sont calcédoines, jaspes, porphyres, marbres, cristaux et autres cailloux riches et plaisants à la vue... ains semblera que lesdites choses soient ainsi venues de sa propre nature. Et d'icelui rocher sortiront plusieurs pissures d'eau ... et dedans.. il y aura une table de pierre rare... assise sur un rocher... où seront enchâssées plusieurs espèces de pierres rares... et en frise dudit cabinet sera écrit: LE FRVIT DES BONS LABEURS EST GLORIEVX.
Et sur le tympan de la première face: DESIR DE SAPIENCE MENE AU REGNE ETERNEL.
Et sur celui de la seconde face: DIEV N'AIME PERSONNE QVE CELVI QVI HABITE AVEC SAPIENCE.
Et sur le troisième: PAR SAPIENCE L'HOMME AVRA IMMORTALITE.
omme le précédent, mais les pierres proviennent des navires qui, chargés d'hommes, de bétail et d'artillerie vers les Amériques, au retour vers l'Europe, lestent leurs cales de pierres. Au pays du Poitou s'en trouve de toutes grosseurs, qui sont si blanches qu'étant ropues elles ont couleur d'un sel blanc ou de sucre fin.[...] En ce pays de saintonge, es parties limitrophes de la mer, s'en trouve grande quantité, qui en quelque part ou endroit qu'on puisse rompre, elles snt pleines de coquilles qui sont formées en la même pierre.[...] Je les formerai en telle sorte qu'il y aura au-dessus plusieurs voûtes, et en icelles yaura plusieurs grandes pierres pendantes. Et pour donner grâce audit rocher, il y aura plusieurs piliers, qui seront conduits en ligne oblique et indirectes.... Je taillerai plusieurs aspics et vipères, où par le derrière d'iceux y aura une languette ou queue de la même étoffe, savoir est de terre. Et ayant cuit et émaillé lesdits animaux, je les maçonnerai parmi les cailloux, pierres et rochers, en telle sorte qu'il semblera proprement qu'ils soient en vie et qu'ils rampent au long dudit rocher.
Aussi de mon art de terre, je formerai certaines pierres qui seront émaillées de couleur de turquoise, lesquelles pierres... seront maçonnées dans ledit rocher; et en icelui rocher je formerai quelque manière d'architrave, frise et corniche.... Et afin de mieux enrichir ledit rocher, je ferai que le champ de la frise sera d'une même couleur de pierre et en la maçonnant, je l'enrichirai de certaines lettres antiques qui seront formées de petits cailloux ou pierres, d'autre couleur que ladite frise; et en ce faisant j'écrirai une sentence:
u coté de la montagne- cotés nord et ouest- Palissy envisage de croiser un grand nombre de chambres.. , les unes serviront à serrer les plantes et herbes qui seront sujettes ès gelées et nuitées d'hiver;... pour retirer les graines qui sont encore en leurs plantes. ... pour serrer grande quantité de perches, paux-fourches, vimes, et toutes choses requises pour le service dudit jardin. ...pour retirer les jardiniers au temps de pluie, et lorsqu'il faudra aiguiser leurs paux-fourches, étapes et perches; ... pour serrer les outils d'agriculture... les naveaux, aulx, oignons, noix, châtaignes, glans, et autres telles choses nécessaires et requises à un père de famille.
... au dessus desdites chambres, le rocher sera coupé, pour servir d'une grande allée ..; ... je ferai aussi croiser dedans ledit rocher un nombre de chambres hautes tout au long de l'allée...: car l'une sera toute taillée en façon de pupitres, pour servir de librairie et étude; l'autre sera toute taillée par autre manière de pupitres, pour tenir les eaux distillées et divers vinaigres; l'autre sera faite par petites armoires, pour tenir et garder la diversitéb des graines. ...une autre qui sera toute faite de rayons de marchands, pour tenir diversité de fruits melés, comme pruneaux, cerises, guignes et autres telles espèces. Il y en aura aussi une qui sera fort utile pour dresser certains fourneaux à tirer les eaux et essences des herbes de bonne senteur; et y aura d'autres chambres qui seront fort utiles pour garder les fruits et toutes espèces de légumes comme fèves, pois, lentilles et autres telles choses semblables. ...
... Et pour la faire ressembler à une galerie, je ferai une muraille tout du long, sur le devant de l'allée... qui sera fleur du devant, et entre les chambres basses, laquelle muraille sera plate par-dessus pour servir d'accotoir à ceux qui se promèneront au devant desdites chambres hautes sur ladite allée, plate-forme et galerie.
... je planterai au-dessus des portes et fenêtres des chambres hautes, tout le long du terrier, un grand nombre d'aubépins et autres arbrisseaux portant bons fruits pour la nourriture des oiseaux, lesquels... serviront comme d'un pavillon au-dessus des portes et fenêtres... et couvriront tout du long de l'allée ladite plate-forme ou galerie.
[...]
... certains damas, violettes, marjolaines, basilics et autres telles espèces d'herbes qui seront sur ledit accotoir, plantées dedans certains vases de terre émaillés de diverses couleurs,... ainsi mis par ordre et égales portions, ils décoreront et orneront grandement la beauté du jardin et galerie susdite.
Aussi au-dessus desdits accotoirs, il y aura certaines figures feintes, insculptées de terre cuite, et seront émaillées si près de la nature que ceux qui de nouveau seront venus au jardin se découvriront, faisant révérence auxdites statues, qui sembleront ou apparaîtront certains personnages appuyés sur l'accotoir... Or pour monter surladite plateforme, il y aura deux escaliers... taillés dedans la même roche.
... e ferai du résidu de la source du ruisseau, lequel passera tout au travers dudit jardin... vers le sud... et quand il sera à l'endroit du milieu, je séparerai le cours... en deux parties, l'une à dextre et l'autre à senestre, en ensuivant le trait d'une rotondité que j'aurai formée au compas. .. puis les deux parties... se viendront rassembler à un même cours... en telle sorte se trouvera au milieu du jardin une petite île, à l'entour de laquelle je planterai certains pibles ou popliers
Les troncs de ces arbres seront formés en manière de colonnes et le reste, traités comme les "hommeaux" avec architrave, frise et corniche, et couvert en forme de pyramide; à la pointe des peupliers rassemblés sera un engin en forme d'entonnoir formant girouette dans lequel seront placés des "flageols" de différentes grosseurs et jouant ainsi à tous vents. Sur la frise il y aura écrit:
D'après Franck Lestringant- Recette véritable
Cette grotte de Salomon de Caus, gravure parue dans "Raisons des forces mouvantes" en 1615 pourrait aussi avoir inspiré Bernard Palissy pour la conception de ces mêmes cabinets.
es tonnelles entoureront le jardin. ... au jardin y aura plusieurs petites îles, qui seront environnées de petits ruisseaux qui distilleront d'un chacun des rochers des cabinets, et seront amenés droit au grand ruisseau qui sera par le milieu du jardin. Et par quel moyen, je ferai que ces ruisseaux feront en eux en allant au grand ruisseau certaines circulations, qui causeront des petites îles fort plaisantes et propres pour arroser les herbes qui seront plantées esdites petites îles.
Ensuite Bernard Palissy nous conte comment il arrosera son jardin à l'aide de bois de "seu" alimenté par les pissures des cabinets.
D'aute part, il utiluisera certaines statues qui auraient quelque vase en une des mains, et en l'autre quelque écriteau, et ainsi que quelqu'un voudrait venir pour lire ladite écriture, il y aurait un engin qui ... verserait le vase d'eau sur la tête de celui qui voudrait lire ledit épitaphe.
Cet engin rappelle la "quinette" qui, dans l'œuvre de Colonna, asperge Poliphile. Ce dernier est amenée au bain par des nymphes nues dans une grotte: "Quoy entendant moy, qui ne desiroie sinon leur gratifier & complaire, ains me rendre serf & subgect pour leur faire quelque service, y couru sans mal y peser: mais je n'eu pas si tost mis le pied sur un degré pour m'approcher de l'eau tombante, que ce petit enfant leva sa quynette, & me pissa droict contre le mylieu de la face, un traict d'eau si froide & si forte, que je cuiday tombera à la renverse; parquoy si grade & haultaine risée feminine se print à resonner soubz ceste voulte, que moymesme qui pensoie estre mort, me prins à rire à gorge desploiée. Puis revenat petit à petit à moy, j'apperceu la tromperie de lartifice, industrieusement trouvée: car en mettat sur un degré mouvant qui là estoit, aucune chose de pesanteur, il tiroit amot par un contrepoix, la petite quinette de l'enfant: parquoy entendue la subtilité de l'engin, je demouray bien satisfaict."
De même je voudrais aussi faire d'autres statues, qui auraient une certaine boucle ou anneau en une main, afin que, quand les pages courraient la lance contre ladite boucle, ainsi qu'ils frapperaient ledit anneau, la statue leur viendrait bailler un grand coup sur la tête d'une éponge abreuvée d'eau...
oté du vent du sud seront prairies... et au milieu passeront les mêmes ruisseaux qui passent au jardin. A dextre et à senestre dudit ruisseau seront plantées plusieurs belles aubarées, et tout à l'entour, et le long des deux extrémités de la prairie, seront plantés nombre d'aubépins, qui serviront de clôture et muraille pour la défense de ladite prée.... et la confrontation du jardin devers le vent d'est, seront certains champs, plantés par égales parcelles, de diverses espèces d'arbres fruitiers, squi seront de grand revenu- savoir est un champ de noyers, un autre de châtaigniers, et un autre de nousillers, poiriers, pommiers, bref, de toutes espèces de fruits. Et du côté du vent de nord seront les mottes pour les cherves, lins et aubiers doux, et certains vimiers, pour servir à la ligature du jardin; et devers le côté du vent d'ouest seront les bois, les montagnes et rochers...
près avoir blâmé les simoniaques, B. Palisssy affirme: je n'ai rien trouvé de meilleur que de fuir le voisinage et accointances de telles gens, et me retirer au labeur de la terre, qui est chose juste devant Dieu. [...] Mais je n'ai trouvé en ce monde une plus grande délectation que d'avoir un beau jardin. Aussi Dieu ayant créé la terre pour le service de l'homme, il le colloqua dans un jardin, ... qui fut cause qu'en contemplant le sens du psaulme cent-quatrième,... il me prit dès lors une affecrion si grande d'édifier mondit jardin que depuis ce temps-là je n'ai fait que rêver après l'édification d'icelui. Et bien souvent, en dormant, il me semblait que j'étais après,... , que mon jardin était déjà fait, en la même forme que je l'ai dit... et que je commençais déjà à manger des fruits et me recréer en icelui, et me semblait qu'en passant au matin... je venais à considérer les merveilleuses actions que le Souverain a commandé de faire à nature.
S'ensuit une contemplation des merveilles de la nature et un mépris des grandeurs et gains déshonnêtes...
n étant en un tel ravissement d'esprit, il me semblait que j'étais proprement audit jardin, et que je jouissais de tous les plaisirs contenus en icelui... mais aissi des confrontations et lieux circonvoisins.. Car il me semblait proprement que je sortais du jardin pour m'aller promener à la prée... et qu'y étant je voyais jouer, gambader et penader certains agneaux, moutons, brebis, chèvres et chevreaux, en ruant et sautelant, en faisant plusieurs gestes et mines étranges.
[...]
Toutes ces choses me donnaient un si grand plaisir, que je disais en moi-même que les hommes étaient bien fols d'ainsi mépriser les lieux champêtres et l'art d'agriculture, lequel nos pères anciens, gens de bien et prophètes, ont bien voulu eux-mêmes exercer, et même garder les troupeaux.
Puis Palissy se délecte du chant du ruisseau et de celui des oiseaux qui lui rappellent le psaume CIV:
Que les ruisseaux passent et murmurent aux vallées et bas des montagnes.
et
Que les oiselets font résonner leurs voix sur les arbrisseaux plantés sur les bords des ruisseaux courants.
Bernard Palissy finira ses jours à la Bastille, victime des gens aux pratiques qu'il dénonçait. Aujourd'hui il est reconnu génial savant et artiste accompli; son nom ne provoque qu'estime et admiration.
P. Jonain lui dédia une complainte. lire
Le parc du château de Chaulnes
Château de Chaulnes au 17e siècle, détruit au 19e siècle. et, en 1564, le parc de Francueil furent créés sur le modèle du "jardin délectable".
Casimir Chevallier soutient que le jardin de Catherine de Médicis de Chenonceau aurait été inspiré par le jardin délectable de Bernard Palissy sans qu'aucun document puisse l'affirmer.
Nota: L'ouvrage "Architecture, et ordonnance de la grotte rustique de Monseigneur le duc de Montmorency" inspira les jardiniers français appelés à Beddington dans une propriété de la reine Elisabeth pour créer un site consacré aux grottes et aux jeux d'eaux dans les jardins.
Comparons maintenant le jardin protestant de B. Palissy à celui du père jésuite Louis Richeome.
Dans son ouvrage "La peinture spirituelle ou L'art d'admirer aimer et louer Dieu en toutes ses oeuures, et tirer de toutes profit salutere", le père Louis Richeome nous présente au sixième livre Les tableaux des jardins & merveilles des herbes & arbres, en leurs racines, bois, escorces, fueilles, fleurs, fruicts & semences. Item de certains oyseaux, & insectes; & de la Pyramide du bas jardin que l'Aucteur y met par decence.
Dès l'entrée il nous avise sur ces Tableaux divinement tirez à la naturelle, très dignes de l'oeil de votre considération, parce qu'ils portent en la peinture de la nature, & qualité des plantes, & arbres, qui y croissent; plusieurs instructions aussi plaisantes à voir, & entendre, que utiles à refectionner vos esprits.
Voici la grande porte pour entrer au premier jardin: cette vierge figurée sur le linteau, voilée d'un crespe bleu, semé de croix blanches, & de roses d'or, c'est l'ame dévote, qui désire voir son époux Jésus-Christ en son jardin, & prononce ces mots: "Que mon bien-aimé vienne en son jardin." Sur la même porte vous voyez Jésus-Christ entouré de baume, d'hysope, de lys, de roses, & d'autres plantes, & fleurs odoriférantes, respondant au souhait de son espouse, en ces paroles escrites au rouleau entortillant cet arbrisseau de Myrrhe. "Ma soeur espouse, je suis venu en mon jardin: j'ay moissonné ma myrrhe & mes drogues de bone odeur
.
Voyez en ce premier jardin, ces compartimens diqprez de mille bonnes herbes, ces quarreaux de fleurs esmaillées de vives couleurs, & parfumées d'odeur très soüesve: Ces murailles tapissées de citronniers, & limonniers, qui rempent sur leurdevant à guise de lierres avec leurs fleurs argentines, & fruicts pendans; les uns verds, comme boules peintes, les autres comme pommes d'or; ces bordures de meurte, de thin, d'hysope, de rue, de petits cerisiers, & gruseliers, & d'autres menus simples; ces allées ombragées d'orangers, & de lauriers, ces cabinets, ces sièges & balustres façonnez en bois, & peincts sans couleur, ny pinceau.[...] Mais cette fontaine relevée au milieu des parterres rejaillissant vers le ciel en grande abondance, & roideur, par le maistre tuyau & autour du bassin par les petits canons de plomb frigans à menus filez, les uns contre les autres, ne vous donne-elle pas la figure, & contemplation d'un Paradis terrestre. [...]
Commencez par les choses, qui semblent les plus vulgaires, & les moindres, & prenez en premier lieu les harbes , tant celles qui sont natives de ces régions, que les autres, que Dieu faict croistre es lointains païs, que je vous feray porter icy à petits frais; Et adjoustez la cognoissance des unes aux autres, comme lettres à lettres, & composez-en des dictions, & périodes mystiques, lesquelles vous fassent entendre le nom, & donnent la refection spirituelle, que vous cherchez. En voila, qui s'eslèvent un peu de terre sur leur couche,& estallent leurs fruicts. Ce sont les espinars, les chicorées, les laitues, les choux, les endives, & autres dont la fueille, est le fruit, & paroit sur terre. En voilà d'autres, qui au contrere croissent dans terre, & y font leurs fruicts faisant paroistre quelques fueilles sur terre; ce sont ces pastenades, raiforts, aulx, oignons, raves, & semblables, qui n'ont que fueilles & fleurs en veuë, & cachent es entrailles de la terre la meilleure substance de leurs provisions. Voyez les autres, d'une troisième nature, qui ont bien, fueilles, fleurs et fruicts au dehors; ce sont les blez, les légumes, les melons, citrouilles, & cocombres & autres plantes, qui ne tiennent en terre qu'avec une petite chevelure de racines, esparse ça, & là, & se contentent d'un peu de nourriture qu'elles succent, pour tout salère & qui payent leur maistre avec les deniers de tout leur revenu, à cent pour un. Et toutes ces herbes comme leurs fruicts sont diversifiées d'un merveilleux artifice, en fueille, en fleur, en couleur, en saveur, en grandeur, en durée, en saison, comme vous voyez, & comme je vois feray voir cy après plus au long.
Suit une longue section baptisée "Considération spirituelle pour admirer Dieu au suject des plantes"
Dieu a prefix & donné, selon son bon plaisir & sagesse, la quantité & qualité aux herbes comme aux autres créatures, gardant une loy ordinère en un lieu, & une en un autre. La maulve est fort petite, & comunement de deux pieds de hauteur en plusieurs endroits de l'Europe. Icy en Italie elle est si grande, qu'elle semble plustot un arbre qu'une herbe: vous en avez vue en ce jardin, dont les branches montent à dix pieds à mesure d'un arbre; & ailleurs on a veu de vingt pieds. Ce que les anciens aucteurs n'ont pas oublié de noter. Car un naturaliste escrit qu'il s'en est trouvé au septième mois de leur naissance, de l'espesseur surpassant la brassée d'un homme, & l'estendue d'un grand arbre. Le mesme est du Fenouil, Pastenades, & Cardes qui se haussent jusques à douze pieds, & en grosseur plus de deux, & les Asperges jusques à esgaler la hauteur des roseaux Indois, qui ailleurs ne vont pas plus haut que cinq pieds. Au contrère les melons sont icy de la grosseur que vous savez, & leut saison est une fois l'an. En la petite Espagne des mondes nouveaux, un seul melon faict la charge d'un homme, & les Melonniers les produisent tout le long de l'an; les fèves ez pays de l'Europe sont petites en leur feuillage, & en leurs fruicts comme vous savez. En Ægypte elles sont si amples, & si touffues, que sous l'ombrage d'une, plusieurs hommes peuvent manger en esté. Et les fueilles, & gousses servent de plats, & de tasses, sans prendre autre forme que la nature. [...]
La Ruë est icy petite, & sert de bordure aux parterres des Jardins; Zonare après Josephe Juif, tesmoigne qu'en Judée, auprès du chasteau de Machéronte, elle devient aussi grande que les plus grands figuiers.
Un grain de blé en ces pays germe quatre ou cinq fois; le tuyau plus gros estant comme le canon d'une plume d'aigle, & de la longueur de six pieds au plus, & ce une fois l'an. En Affrique sont sortis autrefois quatre cens espics d'un seul grain, & en furent envoyéz à Néron trois cens quarante venus d'un mesme grain, les tuyaux espez d'un poulce, & longs de cinq coudées, rendant deux cens, voire quatre cens pour un, & deux fois l'année.
Ce que j'ay dict touchant l'abondance des herbes servira pour savoir les merveilles de Dieu en la variété de plusieurs herbes sur leur qualitez, mais qui en pourra dire la millième partie? Le Brésil donne une herbe qui a sentiment: car elle reserre ses feuilles ,si quelqu'un s'approche d'elle, & les dilate après quand il s'en est allé; les Brésiliens l'appellent par prérogative l'herbe Vive pour ce sentiment , par ce aussi qu'elle est toujour en vigueur, & toujour verdoyante, ne craignant non plus le chaud et le froid, portant en cette qualité la semblance de l'homme pieux, & juste, dont la fueille, & belles oeuvres sont toujour en verdeur aussi bien en la glace de l'adversité, qu'en la chaleur de la prospérité. [...] Mais que direz-vous de l'herbe appelée Sabine, ou Rododasné (sic) chargée toujour de fueilles qui semblent la rose, venin mortel aux chevaux, aux chèvres, & aux brebis, & autres bestes quand elles en mangent; et à l'homme antidote, & remède contre toute sorte de venin? N'a elle pas en cela la semblance de la saincte escriture, qui est poison aux hommes bestiaux, & charnels, comme sont à bon titre les hérétiques, & remède contre toutes hérésies, & venins spirituels aux hommes de raison [...]
Oyez encor la merveille du lin, appelé des Grecs Asbestin, croissant aux desers des Indes sous les ardeurs du Soleil brulant, & parmi les serpens, & les bestes vénimeuses, où jamais il ne pleut, qui est plus fort que le feu, & s'en moque, & duquel les toiles jettées au milieu des flammes en sortent non seulement sans lésion, mais encor nettoyées comme l'or tiré de la fornaise, ou encore comme les draps blanchis à la lexive, comme ceux, qui l'escrivent, ont veu de leurs propres yeux? De ces toiles estimées plus nobles, & plus précieuses que l'or, que les diamans, & pierres précieuses, on en faisoit des Tuniques aux Roys defuncts, desquelles ils estoient revestus, & armez contre la corruption quand on les mettoit au sépulchre.
Après les herbes, & les merveilles d'icelles, en leurs qualitez intérieures, considérez-les en leurs beautez extérieures qui sont leurs fleurs. Considérez ces roses de plusieurs espèces, rouges, incarnates, blanches, doubles, simples, petites, grandes, espanies, en bouton: les unes odoriférantes, les autres sans odeur. Ces oeillets blancs, rouges, grivolez, incarnadins, & violets: tous sortant de leur petit canon vert, & donnant leur odeur de gyrofle! Ces lys posez dessus leur tige comme dessus un sceptre, espanis à six fueilles, ayans au dedans leurs verges d'argent aux martellets d'or qui sortent du coeur. Ces violiers, qui produisent les violettes de Mars. Et ces autres, qui donnent en plusieurs mois de l'an leurs présens & leurs fleurs rouges, blanches, jaunes, meslées, tous parfumans l'air d'une odeur très-souesves. Ces Héliotrope à la grande tige au bout de laquelle pend cette longue, large & Royale fleur, formée en coronne, frangée de longues feuilles & filez d'or, à guise de rayons solères, qui se tourne au soleil à son resveil, le regarde, & le suit en sa course jusques à son coucher! Considérez ces jaussemins, & leurs fleurs, à quatre, à cinq & six fueilles; ces marguerites, ces passeroses, ces pavots doubles, blancs, rouges, & meslez! Ces Aubifoins blancs pourprins, de couleur de ciel, & mille autres excellences jardinières, dont vous embellissez les autels de celuy qui les a faictes. [...]
Combien que votre jardin soit riche en beaucoup de beautés de fleurs, si n'en a il pas une infinité d'autres, qu'on voit ailleurs. Il n'a pas la variété des lis, des soucis, des espées, des tulipans, des narcisses, & autres sortes, sans nombre, qui se voyent en diverses contrées du monde nouveaux; & ne se voyent pas à Rome, ny en Italie. Il vous faudroit au moins estre en France, en la bonne ville de Bordeaux quelque temps, chez ce pieux, docte & grave Président Cheysac, qui a faict venir des Indes Orientales & Occidentales, & les richesses de leurs fleurs en son jardin, ou chez le savant & vertueux Renier, tenant rang honorable en celle Eglise Métropolitaine de saint-André ou à Montpellier au jardin du Roy. Illec vous verriez à chaque à chasque mois de l'an un renouveau de nouvelles fleurs, & nouvelles beautez: leur naissance, leur durée, & leur fin, & ayant tout veu, & admiré, vous n'auriez pas veu la milième partie des autres fleurs, qui naissent, & renaissent aux terres lointaines, aux montaignes, collines, & vallées, des mondes nouvellement descouverts; si bien, & divinement ce Dieu de la Nature, grand aux choses grandes, & aux petites, s'est icy esgayé comme en plusieurs autres petits subjects, & si admirablement joüé en la multitude de plus d'un million de fleurs diversifiées en qualité, en figure, en couleur, en durée & bigarrure, & vertu, se monstrant en chacune, & en toutes, comme tout puissant, ainsi tout sage, & tout bon!
J'ay achevé ce que j'avais à dire des Tableaux de ce premier jardin; je vous advertis en sortant de regarder deux nobles pièces de grand Christophe Clavius, l'Euclide, & l'Archimède de nos siècles, & grand ornement des sciences célestes en cette compagnie; l'une est l'horologe horizontal, tracé sur cette ardoise plantée sur le pilier en l'anglede cze secod quarreau. Et cet autre vertical, aligné en la muraille du logis, tous deux de l'invention ancienne, non d'Aximènes Milesien, qui fut disciple de Thalès, l'un des sept sages de Grèce, & vesquit l'an du monde 3560.
Cet hommage aux savants et astonomes grecs permet à Richeome de nous rappeler les miracles d'Esaïe et de Josué qui arrêta le soleil et de comparer la vie humaine représentée en une journée pouvant s'achever à n'importe heure et minute du jour.
es premiers livres de l'"Amadis de Gaule", romans de chevalerie, parus au XVIe siècle, furent écrits par Garci Rodríguez de Montalvo qui s'inspira d'une oeuvre du XIVe et qui se poursuivit après lui, constituant ainsi une véritable saga et dont les premiers livres furent traduits de l'espagnol par Nicolas Herberay des Essarts.
Le onzième livre qui nous intéresse ici fut traduit par Jacques Gohory, également traducteur de Machiavel.
Bien qu'il contesta la traduction du "Songe de Poliphile" en jugeant que Jean Martin avait gasté celle du chevalier de Malte et qu'à une telle oeuvre stéganographique on ne devait rien ajouter, rien soustraire, il reconstruit le livre selon ses propres interprétations en ajoutant de nombreux chapitres et poèmes de son invention mais aussi en changeant l'ordre des chapitres originaux.
Dans ce roman traduit par un adepte de l'alchimie, toutes les descriptions sont un jeu de références à des enigmes, des allégories où l'on retrouve des personnages de "Poliphile", des éléments mythologiques, médiévaux ou antiques.
e palais d'Apolidon sera construit par Cinistides. Ce palais et la tour de l'Univers seront le "chasteau de Febus et de Diane.
Le château à trois corps d'hostelz ...c'est à dire des trois logis faisans le donjon
dans laquelle s'imbriquent les quatre autres qui composoient le pourpris d'iceluy, estans assiz comme quatre boulevers ès coins de la carrure de la court.
Le "logis de Vénus", inondé de fleurs fort recreatif en jardinages [...] avec allées couvertes de berceaux de roses muscades et jossemins, souef fleurans et petites fontaines ruisselant par lieux touffuz ombragez d'arbres fruitiers.
Dans le palais de Mars où un bâtiment est concacré à Phebus , "les meubles estoient d'or" et dans l'un d'eux on y trouve toutes eaux, huilles et ongnemens de medecine: desquelz le beau jardin fournissoit les herbes, gommes et fruicts: estans les quarreaux d'icelluy despartis selon les proprietez diverses, l'un pour les playes, l'autre pour les fievres, icy les plantes chaudes, icy les froides et ainsi des autres.
Puis le jardin de Mercure faisoit plusieurs isles par le verger, en pareille façon que la mer fait en ce monde, departant les regions de la terre, Europe, Asie et Afrique, comme une vraye carte terrestre et marine.
de telle sorte "qu'il pouvoit servir d'une carte de Cosmographie."
Icy est le parc de hault bois peuplé de grans bestes (auquel Diane chassoit) encloz au pourpis de son palais.
Aussi le verger de Vénus croizé en allées, couvertes de berceaux revestuz de coudres: & un pavillon au mylieu souz lequel la grande fontaine fait un large canal es deux costez des allées, laissant à sec un quartier de terre planté à la ligne de tous arbres fruittiers exquiz, l'autre en tailliz & garenne, le tiers en jardin à fleurs, le quart en dédalus d'orangers, grenadiers & citronniers: auquel y avoit sept pavillons d'arbres courbez dõt le septiesme estoit au vray point du mylieu du labyrinthe garny de sièges verdz pour le repos du voyager qui voyoit là une statue d'albastre transparent & mouvant à trois visages, contenant de grands mystères qu'il ne luy estoit loysible de dire ne rapporter aux autres à son retour. Mais (s'esgarant & fourvoyant es sentiers divers des carrefours) rencontroit trois de ces pavillons qui à l'entrée en ouvrant l'huis le baignoient d'un seau d'eau ou (passant sur petitz pons couvers de mousse & motte herbue) tomboit & prenoit des connins verdz.
Voir également les jardins des alchimistes, page suivante.
e jardin, pour Gilles Corrozet est un locus amænus proche du paradis, tout comme celui de Ronsard ou de Charles de Sainte-Marthe.
Jardin plaisant, doulx, delectable, Jardin en tous fruictz profitable Jardin fermé de toutes fleurs, Painctes de diverses couleurs, Comme le lis, la Rose franche, L'œillet, & L'aubespine blanche, La violette humble & petite, Le doulx muguet, la Marguerite, Le Romarin, la marjolaine, Le baulme qui faict bonne allaine, Et aultres odorifferentes En leurs vertus bien differentes, Jardin ou est & a esté Le frais umbrage en chauld esté, Au moyen des arbres plaisantz, Qui empeschent les rais luysantz, De Phœbus, affin qu'il ne jecte, Dessus la terre à luy subjecte Son ardeur par trop excessive. Jardin plein de beaulté naysve, Ou font maintz berseaulx umbrageux Soubz qui on joue à divers jeux, Comme à la boulle & à la bille. Jardin ou la treille fertille Se joinct aux berseaulx dessus dictz, O jardin petit Paradis, |
Lieu ou VENUS & ses charites Departent d'amour les merites, Et ou CUPIDO va marchant, Tenant en main son dard trenchant, Lequel il brandit & envoye, Contre celluy qu'il treuve en voye, Et le fiert de telle rigueur, Que l'aultre en demeure en langueur. Jardin ou les arbres ramez Sont illec plantez & semez, Et portent fruictz de toute sorte, Comme l'année se comporte, La sont Amandiers & meuriers, Pommiers, Cerisiers, & Poiriers, Peschiers, Pruniers, cascun si renge, La croist le beau pommier D'orenge, Le Pin, le Cedre, & le Cypres, Et l'olivier se tient aupres, Et soubz ses arbres & rainseaulx Courent les argentins ruysseaulx, Remplis de differentz poissons. Jardin paré de verds buissons, Ou les oyseaulx par leurs doux chantz Font retentir l' ær des beaulx champz, Comme nature le dispose. O beau jardin que l'on arrose, Pour en avoir fruictz, fleurs, & fueilles, Je te supplie que tu vueilles A jour propice m'estre ouvert, Pour y donner la cotte verd, A celle (par ma loyaulté) Qui passe ung jardin en beaulté. |
Il ne suffit pas de versifier pour devenir poète, ce texte le montre!
"omptes amoureux par Madame Jeanne Flore, touchant la punition que faict Venus de ceux qui contemnent & mesprisent le vray Amour", tel est le titre d'un recueil de sept contes qui devait en compter dix, d'une ou d'un auteur(e) dont on ne connait aucune autre œuvre et dont on ne trouve aucune référence dans les écrits de cette époque.
Dans le second conte, intitulé "Compte second par Madame Andromeda est décrit le temple de Vénus: En ce temple de Venus estoit ung beau jardin hors les murs de Mison non guieres loing, d'où souspirait ung vent doulx et soif: fertile et plein de divers arbres domesticques, portant fruictz savoureux en diversité. Lesquelz arbres de leurs espaisses fueilles, au lieu rendoient ung delectable et délicieux umbraige, entre aultres le myrthe chargé de fruictages vers estoit prochain de la Deesse. Ne en ce divin et sacré vergier n'y avoit plante qui fust envieillie du long aage. Mais les veoit on fresches avec leurs rinceaux jeunes à l'environ. En oultre les fructifères, y avoit beaucoup d'aultres sterilles, qu'on avoit la plantez pour leur beaulté: comme cypres, et platains: lesquelz sembloient toucher le Ciel de leurs cimes. Et ensemble là estoit l'arbre de la fille de Peneus combien que jadiz fut l'ennemye de la Deesse. A l'environ de chascune plante, comme par decoration sailloit l'hyerre mignonement entrelaceant: aussi la vigne embrassoit plusieurs desdictz arbres chargés de raisins meurs, lesquelz les bons serviteurs de Venus espraignoient en tasses d'argent et en bevoient le moulst à ce eulx invitans en joye et lisse les ungs les aultres. Car l'esbat amoureux est plus doulce si le Dieu Bacchus y adsiste et est presens, c'est une compagnie (que je le die ainsi) delectable et qui peut beaucoup, que Venus avec le bon Bacchus, et desjoinctz quasi en est tousjours moindre la delectation. Donc en ce jardin et forestz amoureuse fort umbragée avoit plusieurs sieges dressez expressement de gazons vers où estoient convenuz à ce jour les Citadins de Mison les uns icy, les aultres là par troppes et bandes faisant entre eulx la plus grande chiere du monde.